Bienvenue à tous et à toutes,
L’entre-deux du Black Friday et des fêtes de fin d’année est probablement le meilleur moment pour philosopher. Nous sommes en pleine période de surconsommation, et le 21e siècle s’annonce comme celui des enjeux économiques et environnementaux. L’instant idéal pour questionner la manière dont nous avons été formatés.
Pour ce faire, le voyage est au départ de la Pyramide de Maslow, et arrive à Samos, en Grèce en -300 av. JC afin de rejoindre Épicure.
Abraham Maslow est généralement connu par les psychologues et markéteux pour sa pyramide des besoins. Il est le fondateur du courant de psychologie humaniste. Ce dernier cherche à comprendre les raisons d’une santé mentale positive et la réalisation du plein potentiel de chaque être humain. Dans ce cadre, la pyramide des besoins a été conçue pour schématiser le trajet permettant d’atteindre son plein potentiel.
D’abord personnel, puis sociétal, chaque besoin doit être réalisé avant de pouvoir passer au suivant :
Physiologique - se nourrir, dormir, respirer…
Sécurité - avoir une source de revenus, une bonne santé, un environnement sain…
Appartenance - être entouré par des amis, une famille, un/une compagne…
Estime - acquérir le respect des autres, représenter une forme de réussite…
Auto-réalisation - appliquer sa créativité, propager ses opinions, avoir une passion…
La dernière étape de l’auto-réalisation est définit par Maslow comme “tout ce qu’un humain a le potentiel de devenir”. Un niveau qui à ses yeux n’arrive qu’exceptionnellement dans la société. De son vécu, il aura pu admirer certains exemples comme l’athlète Muhammad Ali ou l’homme d’État Winston Churchill. Du nôtre, les lignes sont plus brouillées. Par exemple, un influenceur sportif pourrait remplir ses critères d’auto-réalisation.
“Ses” critères, car cette pyramide n’est pas une preuve indiscutable de nos fonctionnements. Par exemple, historiquement, les moines bouddhistes favorisaient l’appartenance et l’auto-réalisation à leurs besoins physiologiques et de sécurité.
“Les disciples du Bouddha allaient d'un endroit à l'autre en Inde pour répandre le Dharma, ses enseignements. Leur compassion ne connaissait aucune limite ; ils aidaient tout le monde sur leur chemin, mendiants, rois et esclaves. La nuit, ils dormaient là où ils étaient ; lorsqu'ils avaient faim, ils demandaient un peu de nourriture. “
Valeurs Fondamentales et Perspectives Bouddhistes pour les Défis de Protection : Foi et Protection, par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés
De retour à ma jeunesse d’étudiant en marketing; peu de temps après avoir pris connaissance de ce schéma de nos besoins, au détour d’un kiosque, j’achète pour la première fois un livre de philosophie. Une centaine de pages résumant les grands courants philosophiques. La pensée d’Épicure y est représentée par une liste ordonnée de besoins à compléter afin d’être heureux. Un modèle quasi similaire à plus de deux mille ans d’écart.
Une différence majeure résidait entre ces deux pyramides. Le besoin d’auto-réalisation, ici appelé besoin de connaissance de soi, se trouvait au premier niveau de la pyramide.
Le sujet constant d’Épicure était le bonheur. Il vivait loin de la ville, proche de ses amis, et dévouait une part de son temps à créer, réfléchir sur ses anxiétés, et comprendre ses pensées. Un mode de vie invitant à améliorer la connaissance de soi, afin de changer la société à travers ce nouveau prisme. Éviter le stress de la vie par la raison et la logique, plutôt que la consommation et l’avidité.
Deux pyramides, construites de deux différentes manières, répondant à la question ultime de la recherche du bonheur et de la réussite. L’un prône la réalisation de ses besoins avant de se connaître, l’autre, de se connaître, avant d’entamer quoi que ce soit.
Aujourd’hui, peu de clés nous sont données au cours de notre éducation et de notre évolution dans la société pour se connaître soi-même, se présente alors la question :
Est-ce le manque de connaissances de soi qui nous a amenés aux limites de notre société ?
Notre société actuelle et grand nombre de ses problématiques a pour moteur principal la surconsommation de ses habitants.
Définition de surconsommation : consommation excessive, qui excède les besoins réels.
Malgré notre pleine conscience du sujet, cela continue. En grande partie, car les entités industrielles qui nous poussent à surconsommer se rémunèrent de nos dépenses. Nos besoins vitaux sont aisément atteignables (voir mode de vie des Amish par exemple), alors pour continuer à croître, nous sommes incités à l’achat par un panel de stimulus psychologiques.
En vient la segmentation sociale, le ciblage, les analyses consommateurs et la publicité afin d’être capable de créer :
Un bien/service
La création d’un public d’acheteur est en réalité la stimulation de nos besoins via des argumentaires bien construits.
En aucun cas, je n’ai besoin d’une sacoche Gucci à 2750€. Mais, le message qui m’est transmis me paraît si pertinent que j’en ressens le besoin. Aussi irrationnel que superficiel, l’achat de cette sacoche m’approche de la réalisation de soi. J’attire l’estime des autres en la portant, j’affiche mon plein potentiel en la partageant.
Ces besoins non naturels nous poussent à consommer ce qui n’est pas un “besoin réel”; donc, à surconsommer.
C’est la raison pour laquelle au 21e siècle, l’auto-réalisation soit synonyme de pouvoir d’achat. L’histoire et l’hyper-capitalisme nous ont amenés là. Les autorités publiques, notamment notre système éducatif n’ont pas su nous montrer la bonne voie. Alors, ce comportement qui n’a rien de naturel, prend une place dominante dans la nature, au point où il nous paraît normal.
En 1943, lors de la reconstruction de la Chambre Commune du parlement du Royaume-Uni, Winston Churchill disait :
“Nous construisons nos bâtiments, puis, ce sont nos bâtiments qui nous construisent.”
Cette phrase résonne encore aujourd’hui. Nos autorités nous “construisent” mal, la pyramide de Maslow, aussi réfléchie soit-elle, nous “construit” mal. Les modèles doivent être repensés car sans démarrer par la connaissance de soi, nous cherchons à accéder à l’auto-réalisation par la consommation.
Cela est représenté par le succès des agences de publicité, des mastodontes de la “fast fashion”, des valuations ridicules de certains NFTs, des ventes pharamineuses d’iPhones d’Apple, etc. C’est également la raison pour laquelle des entreprises comme META, capable de comprendre, segmenter et cibler des profils d’acheteurs sont aujourd’hui si puissantes.
Physiologique → Fast Food
Sécurité → Assureurs
Appartenance → Apps de rencontre
Estime → Marques de luxe
Auto-réalisation → Réseaux Sociaux
Sans connaissance de soi, il semble impossible de dire non à ceux qui nous influencent. Il est donc encore plus difficile de se rebeller contre ce système. L’artiste Barbara Kruger le définit en une phrase :
“Si vous ne contrôlez pas votre esprit, quelqu'un d'autre le fera pour vous.“
Retourner cette pyramide est la clé. Si l’on démarre par la réalisation de soi, chaque étape qui suit dans l’évolution de sa vie est éclairée par la connaissance. Autrement, nous continuerons de manière effrénée les erreurs qui nous ont amenés aux limites actuelles de notre société.
Surconsommer pour répondre à de faux besoins impacte toute la chaîne de production de ce dernier, crée des inégalités financières, atteint à nos santés mentales, et plus que tout, détruit la biodiversité et l’environnement d’une manière quasiment irréversible.
À l’opposé, cette connaissance de soi amènera :
des vies plus saines
des carrières plus prospères
des relations plus épanouies
le respect des générations futures
Pour démarrer, il faut ralentir sa consommation de contenus, ce qui engendrera une baisse de consommation de produits. Plusieurs fois par jours/semaines/mois, prendre du temps pour savourer l’ennui. Réduire les écrans à table, aux toilettes et avant de dormir. Faire des week-ends déconnectés.
Puis, remplir ce temps libre par la connaissance de soi. Pas forcément de la méditation et des promenades en forêt, mais avoir une forme de création permettant de projeter ses opinions et passions.
Prenez l’exemple de cette newsletter. Elle n’atteindra peut-être jamais mille abonnés. Mais c’est un outil de réflexion, de concentration, de partage d’opinions, d’amélioration de certaines compétences, etc. La preuve en est, j’écrivais il y a peu sur le rêve ultime de la consommation dans le Metaverse, aujourd’hui, je rêve de la chute de ses créateurs.
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Le dernier “Top contenus” ciblait particulièrement les Tech Bros, si vous ne l’avez pas vu passer, il est juste en dessous.
De bonnes fêtes à toutes et à tous, rendez-vous en 2023.